Carnet 8. Mouvements d’un regard. Passants, 2010-2015
Regarder ce qui est mis en mouvement : une vague, un oiseau, un nuage, une silhouette, et l’arrêter avec la prise d’une image, elle, définitivement immobile. Temps suspendu à ce qui n’est déjà plus, à ce que l’image d’après ne restituera qu’avec peine, condamnée irrémédiablement à s’arrêter, laissant alors le mouvement se poursuivre, sans elle.
Chercher malgré tout à saisir ce qui se meut. Mouvement des vagues, avec un invisible, le vent. Mouvement du ciel, avec ce même invisible, le vent. L’envol d’un oiseau. Mouvement de la marche, d’un geste. Saisir des passants est un moment très rare pour moi, il y faut l’ajustement de la rencontre, et un outil de prise d’images qui me le permette. Autant de silhouettes auxquelles je m’attache. C’est le seul regard que je m’autorise sur elles : de loin, à distance, parfois de dos, dans l’ombre, en petit. Pas reconnaissables. Je ne saurai jamais leur destination, la suite de leurs prises.
En regardant les images immobiles, je continue d’entendre le rythme sonore d’une vague qui se retire, d’accueillir la forme éphémère d’un nuage, sentir l’insistance du vent, partager la jubilation d’un enfant face à la mer, d’éprouver la fragilité d’un pas sur le sable. Un instant de vie.